Une société Coloniale avancée

Luis Felipe Noé est un peintre, né en 1933, de la mouvance « Nouvelle figuration ». Il a publié en 1971 donc 2 ans avant le coup d’état militaire le livre « Una Sociedad colonial avanzada ». Plutôt qu’un livre, il s’agit d’une œuvre d’art conceptuelle, qui regroupe des aphorismes sur la société argentine et des dessins ironiques de Quino ou Oski. Il s’apparente aux ouvrages situationnistes chargés du venin de la révolte. Il trace un portrait vu de l’intérieur assez acide de l’Argentine et il vaut le coup d’œil. La thèse principale est que l’Argentine croit faire partie des grands pays du monde alors qu’elle n’est en fait qu’une colonie des pays riches. Cette erreur d’auto estimation entraîne des tensions intérieures et une grande instabilité psychique et économique.
Voici quelques extraits :

« une société où la majorité est contrainte par la minorité à se sentir une minorité »

« Une société par superposition d’individus »

«  Une société qui croit que constituer une nation est une question formelle : avoir une constitution que personne ne respecte et quelques symboles patriotiques qui sont les seuls à être respectés. »

« Une société qui craint sa propre mobilité car elle déséquilibrerait son instabilité »

« Une société où tout ce qui n’est pas interdit est obligatoire »

« Une société dont l’art est une image de ce qu’elle n’est pas »

« Une société tellement authentiquement nostalgique des autres sociétés qu’elle fait de tout ce qui ne lui est pas authentique, son authenticité »

« Une société qui fait de l’égocentrisme un acte militant »

« Une société qui croit que regarder son nombril c’est prendre conscience d’elle même »

« Une société centrée sur une idée claire : la confusion générale »